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07.02.2020
#PHILANTHROPIE

Entretien avec des philanthropes : Chiara et Gérard El Allaf

Philanthropie

Chiara et Gérard El Allaf nous parlent de leur projet philanthropique, une démarche guidée par la passion et étroitement liée à leurs valeurs personnelles. Leur objectif est de créer un écovillage au cœur de l’un des corridors de biodiversité* parmi les plus riches au monde, Paso de la Danta, à Ojochal, Costa Rica.

Chiara et Gérard El Allaf




« En achetant des terres dans cette région, nous protégeons une forêt vierge tropicale unique en son genre, avec l’objectif d’y créer un espace respectueux de la nature et des cultures et populations locales où régnerait l’harmonie. »


Quelle a été votre motivation pour lancer ce projet philanthropique ?

Gérard : Tout a commencé par une expérience profondément marquante dans la forêt tropicale amazonienne avec un groupe d’autochtones. Cette aventure a bouleversé ma vision du monde et m’a incité à me demander quel sens je voulais vraiment donner à ma vie. À cette époque, j’étais entrepreneur spécialisé dans les solutions e-business et e-commerce, une activité intense, extrêmement stimulante, mais parfois stressante. Après cette aventure, j’ai ressenti le besoin de relever un tout autre défi, j’ai eu envie de faire quelque chose d’utile et de renouer avec la nature. Je veux maintenant partager cette nouvelle raison d’être avec autant de personnes que possible.

Chiara : Je suis anthropologue et je vis et travaille depuis plus de 16 ans au Costa Rica. J’ai étudié la culture et vécu pendant plusieurs années avec des peuples autochtones, et notamment le rôle de la femme dans leur mode de vie parfois de type matriarcal. Gérard et moi partageons une vision similaire de la vie : l’importance de vivre en harmonie avec la nature. Ce projet nous offre la possibilité de donner une expression concrète à cette vision et de protéger les écosystèmes de l’un des corridors de biodiversité* les plus riches au monde, Paso de la Danta au Costa Rica.

En achetant des terres dans cette région, nous protégeons une forêt vierge tropicale unique en son genre, avec l’objectif d’y créer un espace respectueux de la nature et des cultures et populations locales où régnerait l’harmonie.

Pourriez-vous nous en dire plus sur votre engagement philanthropique, les actions que vous soutenez et l’avenir de la fondation ?

Notre projet comporte de multiples facettes, mais l’importance de la nature en est l’axe central. Les forêts tropicales costaricaines abritent une biodiversité sans égale et sont menacées par les activités d’agriculture industrielle (notamment l’huile de palme qui est un vrai fléau ou encore la monoculture de l’ananas et de la banane) et la pollution chimique qui en résulte. L’un de nos principaux objectifs est de préserver ces régions, mais aussi de racheter les terres (anciennes forêts tropicales) détruites par des activités telles que les élevages bovins pour les reboiser. Nous avons d’ailleurs récemment planté plus de 3 000 arbres de plus de 150 espèces différentes.

Dans cet endroit unique au monde où vivent plus de 500 espèces d’oiseaux, nous bâtissons un écovillage totalement respectueux de l’environnement et alimenté uniquement en énergie verte où nous pouvons vivre en harmonie avec une nature qui offre aux habitants la nourriture et l’eau dont ils ont besoin. Nous avons 27 sources d’eau potable et des arbres fruitiers et cultivons notre propre nourriture grâce à la permaculture. Nous prévoyons d’ailleurs d’ouvrir une école spécialisée dans l’étude de ce mode de culture afin de contribuer à sa diffusion. Nous voulons expérimenter un nouveau mode de vie qui pourra être étudié par les universités et les gouvernements avec l’espoir qu’il soit un jour copié.

Dans cet écovillage, nous prévoyons d’ouvrir un lieu de retraite où les gens pourront effectuer de courts séjours, éteindre leur téléphone, explorer leur moi intérieur, prendre le temps d’apprécier la nature et le ciel, tout en explorant leur conscience grâce à la méditation, au yoga et au silence.

Ce village disposera d’un studio d’enregistrement musical et d’une galerie où des artistes en résidence pourront exposer leurs œuvres. Il est également essentiel pour nous de travailler main dans la main avec la population locale afin d’offrir à ses membres, et surtout aux femmes, des débouchés économiques.

Nous avons également créé une école alternative qui promeut une philosophie de la non-violence et permet aux écoliers de pratiquer le yoga et la méditation en plus de leur programme scolaire. Nous proposons aussi des ateliers dans plusieurs autres écoles locales.

Quel regard portez-vous aujourd’hui sur votre initiative ? Avez-vous l’impact que vous espériez ?

Beaucoup de choses ont changé depuis le lancement de ce projet. Cette aventure est exceptionnelle et c’est une véritable exploration de soi qui nous a permis de mieux nous connaître tout en étant au service des autres. La vie est devenue plus facile : j’aime à dire que je ne suis qu’un simple jardinier. Quand j’étais entrepreneur, je rêvais de conquérir le monde avec mon entreprise, mais aujourd’hui, je suis heureux de n’être qu’un simple jardinier. Alors que de plus en plus de catastrophes s’abattent sur le monde, l’inconscience prédomine encore mais il y a réellement urgence à agir. En jouant le rôle qui est le nôtre, nous avons le sentiment d’apporter notre pierre à l’édifice et d’être à l’origine d’un changement positif.

Quels conseils donneriez-vous à des personnes souhaitant se lancer dans une aventure similaire ?

Suivez votre intuition !

Prenez le temps de ralentir le rythme et écoutez votre intuition et les personnes qui vous entourent. Au fur et à mesure, nous prenons conscience que le projet sait lui-même quelles sont ses priorités. Il suffit d’être attentif aux signes et de les suivre, ils nous indiquent la bonne direction. Il est ainsi essentiel de réduire l’influence de notre personnalité et de notre ego.

Quand les choses se compliquent, n’oubliez pas ce qui vous a motivé à la base. Gardez bien ça à l’esprit. De plus, même s’il est bon d’avoir un plan d’action et un calendrier, cela doit plus être une ligne directrice qu’une exigence impérieuse.

En quoi l’équipe de conseil en Philanthropie individuelle vous a-t-elle aidés ?

L’équipe de conseil en Philanthropie a été extrêmement utile grâce à ses conseils. Quelle agréable surprise de constater que la banque possède un service de conseil en philanthropie ! Ce sont surtout les contacts qu’elle nous a permis d’établir qui nous ont été utiles. Notre conseiller nous a mis en relation avec la Fondation Roi Baudouin, une fondation hôte qui nous fournit une structure juridique en Europe. Cela permet à tous ceux qui nous soutiennent en Europe de bénéficier des avantages fiscaux associés à leur soutien philanthropique à notre projet au Costa Rica. L’expertise des membres de cette équipe n’inclut pas les conseils en collecte de fonds, mais notre conseiller nous a mis en contact avec des consultants spécialisés qui nous aident à concrétiser nos ambitions. Ce n’est que le début de notre collaboration avec cette équipe.


*L’expression corridor de biodiversité désigne un milieu reliant différents habitats, vitaux pour une espèce. Leur protection et restauration est une nouvelle approche stratégique de la lutte contre la disparition de la biodiversité.

 

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